L’avènement de la technologie a eu un impact sur la façon de travailler et la sphère juridique n’a pas Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©e. L’émergence des Legal Techs liĂ©e Ă la transformation sociĂ©tale portĂ©e par nos usages numĂ©riques bouscule le monde du droit. Les professionnels voient naĂ®tre de nouveaux services et outils innovants nĂ©cessitant l’acquisition de compĂ©tences technologiques et informatiques.Â
Appréhender la logique informatique, comprendre comment fonctionne un algorithme ou utiliser un langage informatique devient essentiel pour exercer le droit de demain. Cette mutation a notamment donné naissance au métier de juriste codeur.
Ainsi, si la technologie a une place importante dans le quotidien des juristes, elle doit devenir un vĂ©ritable atout qui lui permettra d’alimenter son spectre de compĂ©tences. On parle alors de juriste augmentĂ© par la technologie.Â
De nombreuses questions restent toutefois en suspens : Qu’est-ce qu’un langage informatique ? Dois-je le maîtriser ? En quoi des compétences en informatique pourraient m’être utiles au quotidien ?
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Juriste codeur : juriste ou développeur ?
Le juriste codeur est avant tout un juriste.Â
Ce professionnel du droit doit maĂ®triser les problĂ©matiques du mĂ©tier. Il doit analyser les besoins en se posant les bonnes questions toujours centrĂ©es sur l’usage et le client.Â
La technologie doit apporter des solutions à des contraintes métiers: le point de départ doit toujours être une problématique juridique. On parle de juriste augmenté par la technologie. C’est à dire des juristes de formation avec une forte appétence aux nouvelles technologies et un intérêt pour le code.
Les compétences du juriste codeur permettent de retranscrire des questions de droit en lignes de code. Le profil recherché est un juriste avec une forte sensibilité aux Legals Techs et la volonté de comprendre les langages informatiques.
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Qu’est-ce qu’un langage informatique ?
ll s’agit d’une suite d’instructions dans un langage compris par l’ordinateur. Elle sera exécutée afin d’obtenir le résultat souhaité. Ainsi, chaque « mot » de cette langue particulière a un sens : il doit être employé correctement et bien agencé dans la phrase.
Chaque erreur entraînera une mauvaise compréhension voire une incompréhension de l’ordinateur. Il existe une multitude de langages informatiques différents. Certains de ces langages ont une syntaxe assez simple permettant d’apprendre à coder relativement rapidement si l’on est rigoureux et passionné.
Ces langages permettent de retranscrire des questions de droit en code dans un but d’optimisation. Ces programmes permettent d’automatiser des tâches chronophages sans réelle valeur ajoutée.
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Le juriste codeur doit-il nécessairement savoir coder ?
Tout d’abord, au vu du nombre conséquent de langages informatiques, s’il les maîtrise, il s’agit uniquement de ceux qui sont spécifiques à ses besoins. L’objectif n’est pas de transformer des juristes en développeurs informatiques mais qu’ils aient des bases et qu’ils puissent les utiliser au service du droit.
Ensuite, de toute évidence, mettre ses connaissances en pratique permet davantage d’appréhender la logique informatique. Le juriste codeur n’est pas un développeur mais il est capable de créer des algorithmiques juridiques , par exemple via des legalbots ou des robots contrats .
Toutefois, le juriste codeur peut seulement comprendre la logique informatique, afin d’avoir conscience des contraintes techniques dans la rĂ©alisation d’un projet mais Ă©galement de mieux comprendre la logique de raisonnement des dĂ©veloppeurs.Â
Le métier de juriste codeur permet également de créer un intermédiaire entre les experts informatiques de l’entreprises et les équipes juridiques. Capable de dialoguer avec les experts techniques, il pourra également tester les outils en cours de conception en prenant en compte les besoins et contraintes techniques et juridiques.
En quoi la compréhension d’un langage informatique peut-il lui être utile  ?
Il existe une multitude de langages informatiques permettant Ă chacun de dĂ©velopper des outils ou services numĂ©riques. Par exemple, maĂ®triser les langages informatiques tels que HTML et CSS, peut aider le juriste Ă crĂ©er ou Ă amĂ©liorer son site web. Pour l’avocat, l’élaboration d’un site internet permettra au client de s’informer sur la spĂ©cialitĂ© du cabinet, l’actualitĂ© mais aussi de pouvoir contacter le professionnel directement sur le site internet.Â
Cependant, la plupart des langages informatiques maĂ®trisĂ©s par les juristes codeurs sont spĂ©cifiques aux besoins juridiques et ont pour objectif d’automatiser les tâches du quotidien pour gagner en efficacitĂ©. Â
Des exemples concrets d’automatisation de tâches
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Créer des générateurs de contrats
Si aujourd’hui le juriste se retrouve avec d’innombrables piles de contrats papiers qu’il n’arrive plus Ă classer et dans cette mesure, Ă retrouver, la programmation est un alliĂ© de taille ! Â
Elle permettra, grâce Ă une suite d’instructions, de concevoir des gĂ©nĂ©rateurs de contrats, permettant d’en automatiser la rĂ©daction.Â
Le programme permet de complĂ©ter rapidement les informations relatives au contrat en rĂ©pondant Ă un questionnaire conçu en langage juridique clair. Autrement dit, chaque choix de l’utilisateur (juriste, avocat, notaire, directeur juridique) va gĂ©nĂ©rer des clauses adaptĂ©es. L’utilisateur sera guidĂ© tout au long du processus de rĂ©daction par des questions et explications, l’éclairant sur ses choix et options. Le contrat correspondra ainsi parfaitement Ă ses attentes.Â
Au delĂ d’automatiser la rĂ©daction du contrat, il est possible de donner une suite d’instructions sous forme d’un algorithme qui permettra de crĂ©er, nĂ©gocier et signer le contrat. La signature Ă©lectronique a la mĂŞme valeur que la signature manuscrite et permet une authentification du document et une identification des signataires.Â
Enfin le juriste peut directement mettre Ă disposition des opĂ©rationnels le gĂ©nĂ©rateur de contrat. Dans le cadre de nĂ©gociation annuelle, l’automatisation de contrat est un gain de temps majeur et permet de limiter les erreurs lors de la rĂ©daction de ces derniers.Â
Le stockage informatique de ces contrats dématérialisés permet de les retrouver plus aisément mais également de retrouver une clause précise. Le professionnel doit inévitablement s’assurer que le stockage de ses données est sécurisé : qu’il s’agisse de données personnelles ou de données qui apportent une valeur ajoutée au professionnel du droit, eu égard à l’importance du contrat. Personne n’est à l’abri d’une cyber attaque.
Le juriste codeur est donc celui qui digitalise sa pratique du contract management.
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Créer des assistants juridiques virtuels
La digitalisation est un outils très efficace pour faciliter la collaboration entre la Direction Juridique et les Directions Métiers, ainsi que pour optimiser le travail des juristes.
 Un des outils favorisant cette collaboration est l’assistant virtuel ou legal bot, terrain de jeu du juriste codeur qui pratique l’algorithmie juridique. L’assistance virtuelle peut ĂŞtre sous forme Ă©crite mais aussi vocale.
La quasi-totalité des assistants virtuels juridiques sont conçus grâce à une intelligence artificielle faible. L’IA faible, permet, par la création d’un algorithme, de prévoir le résultat d’un comportement spécifique à l’avance, c’est à dire anticiper l’intégralité des cas de figure possible. L’ensemble des questions et des réponses est alors “programmé”, il s’agit d’un système qui imite un programme intelligent dans un domaine spécifique.
Si l’assistant virtuel peut informer et orienter les justiciables, il est Ă©galement très utile au sein de l’entreprise. Il peut s’agir par exemple de rĂ©pondre des questions rĂ©currentes de clients relatives aux diffĂ©rentes modalitĂ©s de garantie des produits ou bien rĂ©pondre aux questions juridiques rĂ©currentes des opĂ©rationnels.
Le juriste codeur est celui qui connaĂ®t les limites de cet outil. Si les Ă©ventuelles questions des utilisateurs sont prĂ©dĂ©terminĂ©es, l’assistant virtuel ne peut pas prĂ©voir chaque formulation qui sont diffĂ©rentes d’un usager Ă l’autre. Ainsi et dans de nombreuses situations, l’ordinateur ne reconnaĂ®t pas la phrase et ne peut rĂ©pondre Ă la question posĂ©e.Â
Afin d’optimiser les performances du legal bot, il est nécessaire de passer d’une IA faible à une IA plus forte, basée sur la reconnaissance du langage. Pour satisfaire les attentes des utilisateurs, les assistants virtuels doivent être conçus de manière à réellement les guider. Le legal bot fait des suggestions, jusqu’à ce qu’une réponse finale soit donnée. C’est la création d’un arbre décisionnel qui permettra de retracer le chemin de question d’un profane en droit.
Double compĂ©tence droit – tech : profil idĂ©al
L’association de compĂ©tences en droit et digital est extrĂŞmement prisĂ©e par les cabinets d’avocats, les directions juridiques et les Legal Tech. Le profil idĂ©al est un.e juriste de formation qui a des compĂ©tences techniques.Â
Maîtrisant à la fois la logique juridique et la compréhension de la logique technique, c’est un poste clé fortement recherché par les Directions Juridiques et les entreprises du secteur de la Legal Tech.
Sources
A.RAYNAUD, Le juriste de demain doit-il apprendre Ă coder ?, juin 2019.
- ANDRY, Contrat et legaltech : quelles transformations ?, janvier 2018.